lundi 31 janvier 2011

Je voudrais (pas) crever @ Théâtre Périscope


C'est demain soir que j'irai voir cette pièce de théâtre inspirée, entre autre, du poème "Je voudrais pas crever" de Boris Vian. En lisant sur le site du Théâtre Périscope, je suis tombée sur la lettre de l'auteur ( Marc-Antoine Cyr) à son metteur en scène (Reynald Robinson). Si vous ça ne vous parle pas, moi si. BEAUCOUP. Alors, je partage avec ceux que ça intéresse. Moi, ça me séduit.

Extrait de la lettre de l'auteur à son metteur en scène
Mon cher Reynald, mon cousin d'âme,

Quand je t'ai apporté le texte de "Je voudrais (pas) crever", j'étais encore tout fébrile de l'avoir jeté sur les pages. Je tremblais parce que j'y abordais une sorte de mort. Celle de ma jeunesse. Celle des anciens rêves rattrapés par le réveil sonnant la vraie vie. J'allais avoir trente ans. Écrire ça me portait et me tuait tout à la fois. Je ne suis pas un désespéré. Tu me connais. Je suis un tendre, un inquiet rieur, peut-être un peu fataliste. Pourtant, tandis que je traçais ces mots-là, j'étais un volcan. Je suintais des coulées chaudes de mots interdits. Je me débattais entre mes élans et mes brûlures, je nageais dans les nuées ardentes du doute.

Qu'est-ce que c'est qu'être un adulte?

Est-ce que c'est se figer, comme les morts de Pompéi après l'éruption du Vésuve, ceux que j'évoque dans le texte, figés à jamais dans un dernier sursaut d'eux-mêmes? Est-ce que c'est prendre la forme du moule? Est-ce que c'est se mettre à ressembler à tout le monde, à perdre ses couleurs particulières? Est-ce que ce n'est pas un peu mourir à soi-même?

J'ai fait porter ce fardeau de la disparition à Mateo, mon personnage central. Comme lui, j'aimerais quitter la vie avec un sourire. Avec bienveillance. Pour l'instant, je ne sais pas si j'y arriverai, le temps venu. J'ai rempli tous les autres personnages de fureurs reconnaissables, d'angoisses, de trop-plein, de rires aussi. La vie de maintenant, c'est de tout ça qu'elle est faite, non? Mes personnages sont des vivants, des survivants, dans la mesure où côtoyer la mort permet de vivre plus fort, plus en vallons, plus en tempête.

La mort de la jeunesse, je disais. Mais je ne suis pas nostalgique. Je suis de mon temps, j'habite sans déplaisir cette ville et ce maintenant pour les écrire. Je ne déteste pas du tout vieillir, passer les ans et aiguiser mieux mon crayon. J'essaie chaque jour de jeter mes yeux aux alentours et de capter les ondes, les âmes qui vivent le même présent que moi. C'est d'elles que je parle. Moi, elles, nous, nous autres, maintenant.

Mon texte est une réflexion existentielle, mais aussi une bravade, un désir de rire de ce qui paraît si lourd à vivre. Mes personnages sont maladroits, hirsutes, aimants. Ils s'aiment avec leurs bleus et avec leurs bosses. On en connaît, des comme ça. Bref voilà, tu comprends ça, toi, ces choses-là. Ces états dans lesquels je me mets pour essayer de saisir l'esprit de mon époque, pour être solidaire avec lui. Cette vision que tu ajoutes à mon texte. Le défilé des saveurs anciennes. La grande beauté de la course de la vie. Tout ce qui s'enfuit derrière soi en agitant la main. C'est tout toi, ça. C'est ton sourire ajouté au mien. C'est nous deux qui nous tenons la main sur le coeur souvent, parce qu'il cogne et qu'il cogne.

Marc-Antoine

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